Je n’aime pas les post-it

Pourtant j’en colle partout sur mes dossiers. J’y inscris les étapes ultérieures du dossier, les tâches à accomplir pour qu’il continue d’avancer. Ainsi, pour que les fournisseurs de fluides, électricité, eau et haut débit, continuent de me livrer, j’écris sur le post-it du dossier intitulé administration : « payer H20 » ou « payer … (un trident pour électricité) ». Je n’ai pas besoin d’écrire « payer ADSL » car le fournisseur d’accès m’a démocratiquement mis en demeure de payer par prélèvement automatique. Cela me contraint de poser quelque part un post-it de tous les prélèvements automatiques auxquels j’ai démocratiquement succombé, et de me rappeler où je l’ai scotché. La quantité de dossiers et la quantité de post-it en vigueur m’obligent à recourir à des post-it de post-it, des super post-it en quelque sorte, lesquels renvoient uniquement à des post-it. Cela donne des choses de ce genre : « samedi prochain, traiter le dossier administration ».

Evidemment, si j’accomplissais un certain nombre de tâches au fur et à mesure qu’elles apparaissent, cela diminuerait considérablement le nombre de recours à des post-it. Hélas je suis un grand paresseux, la seule vue d’un dossier me prive d’énergie, comme une baudruche dégonflée au contact d’une aiguille. Cette propension (ma paresse) est sans doute un reliquat de ma très catholique éducation laquelle a toujours plus ou moins rangé le travail dans la catégorie des punitions (« tu gagneras ton pain à la sueur de ton front »). Bon, peut-être pas, car il y a des tâches à proprement parler surhumaines : ainsi celles du dossier « se réconcilier avec Roxane », mieux vaut attendre que l’eau ne coule vers la montagne. Vous me direz, quelle idée aussi  de me brouiller avec Roxane …

En attendant, les post-it s’accumulent. Ils me procurent l’agréable sensation d’avoir identifié les tâches qu’il me reste à accomplir … lorsque j’en aurai la force ou le courage. Je dirais même plus : le post-it est l’art de repousser à plus tard ce qui pourrait être absorbé au fil de l’eau.

Récemment j’ai ouvert un dossier « mises en demeures ». Je n’ai pas besoin de vous en détailler le contenu : premiers et derniers rappels, contraventions … je le classe toujours au-dessus de la pile, laquelle ne fait que monter. Parfois aussi je tombe sur un dossier en fond de pile, avec des post-it vieux comme Mathusalem, illisibles, froissés. Et quand je pense aux Roxanes qui ont coupé les ponts à mon insu, j’en ai des sueurs froides …

Non, décidément, je n’aime pas les post-it.