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site de Roland Goeller
15 mars 2012

La passion de l’automobile

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En 1960 paraît « Mythologies » de Roland Barthes. En couverture du livre, nulle surprise de trouver la photo de la fameuse DS Citroën, la voiture par excellence, mythique, de la France des années soixante, en plein essor des trente glorieuses. Depuis, la prolifération des DS et de ses petites sœurs a profondément modifié le paysage urbain. Les voies « carrossables », les ruelles étroites, les anciennes lignes de tramway ont progressivement fait place nette à ces grands boulevards indispensables à la pénétration et à la circulation urbaine de l’automobile. La vitesse, la facilité, le naturel presque, avec lesquels les paysages urbains se sont transformés ne s’explique que par un consensus quasi général.

Aujourd’hui, cinquante ans plus tard, les choses ont bien changé. Les énergies fossiles se font rares. Les gaz d’échappement contribuent au réchauffement climatique. Tout acteur de la mobilité est aussi un environnementaliste qui parle CO2.  La voiture se trouve reléguée au rang de la cigarette dont on ne peut se passer mais dont on ne cache plus les effets nocifs. Les villes, les collectivités, les agglomérations déploient des efforts considérables pour changer les comportements, pour favoriser, au détriment de la voiture, l’émergence des transports en communs et des modes alternatifs. Mais la récalcitrante résiste. Semblable au fumeur qui va cloper en cachette, le migrant modèle fait rechute sur rechute et, au moindre prétexte, redevient l’automobiliste accro dont il ne s’est peut-être jamais guéri.

La passion a partie liée avec la possession, les amoureux le savent. La passion est physique. La passion de l’automobile a quelque chose de physique, un quelque chose dont aucun autre mode de transport n’offre un ersatz. Les constructeurs d’automobiles le savent, qui soignent les détails et les finitions, à la manière dont on apprête les call-girls.

Mais la possession a aussi partie liée avec le patrimoine. Même si la comptabilité ne prévoit pas l’inscription des automobiles (sauf les Bugatti et autres voitures de collection) dans les colonnes de l’actif. Le coût d’acquisition d’une automobile est élevé, bien supérieur en tous cas à son coût d’usage (essence, assurance, maintenance ...). Il en résulte que, dès lors qu’on possède une voiture, plus on l’utilise, plus économique devient le trajet. A trajet égal, et sauf envolée du prix de l’essence, il est plus intéressant de prendre sa voiture, les éléments fixes du prix de revient kilométrique sont déjà payés.

Pour que les politiques de transport en commun trouvent leur pleine efficacité, il ne suffit pas qu’elles mettent en place des moyens de transport performants, il convient de surcroît d’organiser le «désamour » de l’automobile, un peu comme on pratique le sevrage de la cigarette. Et deux pistes s’offrent au législateur. D’une part construire des voitures un peu moins « sexy » (personne ne s’arrachait les anciennes Trabant des pays de l’est). D’autre part inverser les proportions des coûts d’usage et de possession dans le prix de revient kilométrique. En d’autres termes, mettre sur le marché, des voitures modestement fonctionnelles, à bas prix d’achat, dans lesquelles les automobilistes mettront du carburant fortement taxé.

Il y a fort à parier que les parcs automobiles se réduisent comme peau de chagrin, mais l’opinion publique est-elle prête à renoncer aux retombées économiques du paradigme de l’automobile ? Aussi longtemps que les élites viendront en quatre-quatre aux conférences sur l’éco-mobilité, l’automobile a de beaux jours devant elle. 

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Commentaires
S
je viens de commander ma nouvelle voiture, indispensable pour vivre à la campagne!
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