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site de Roland Goeller
28 août 2018

Chamisso, Burg Nideck, Le château du Nideck

 

 

 

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Le Château du Nideck (haut Moyen-âge), dresse ses ruines grandioses dans la forêt de Haslach, en Alsace, entre Wangenbourg et Niederhaslach. Elles sont situées sur le territoire de la république française, quoique les consonances évoquent indiscutablement l'histoire allemande. Elles présentent des constructions en pierres de taille d'une dimenson inhabituelle et la légende veut que le château (nous sommes alors à la fin de l'ère carolingienne ou au début du Saint Empire d'Othon) ait été habité par des géants. La légende est parvenue aux frères Grimm. Adalbert von Chamisso l'évoque dans son poème das Riesenfraülein (la géante) dont nous donnons ci-dessous une traduction libre. Le poème s'inscrit dans cette tradition rhénane chère à Hebel, qui intègre à l'esprit de l'almanach les thèmes du romantisme noir. 

Quelques mots à propos de l'écrivain et poète : Louis Charles Adélaïde de Chamissot de Boncourt  (dit Adalbert von Chamisso ou Chamissot) est né en 1781, près de Châlon-en-Champagne. La Révolution exile sa famille à Berlin où il meurt en 1838. Quoiqu'éxilé, il conserve la nationalité française mais choisit d'écrire en allemand. On lui doit notamment ce chef d'oeuvre de la lttérature fantastique Peter Schlemihl (l'histoire d'un homme qui a vendu son ombre au diable et qui parcourt le monde pour la retrouver). Le caractère grandiose, voire inquiétant, des ruines du Nideck aura trouvé une résonance dans l'âme du poète qui, dans les premiers temps de son exil, s'exclame :  « Ma patrie : je suis français en Allemagne et allemand en France, catholique chez les protestants, protestant chez les catholiques, philosophe chez les gens religieux et cagot chez les gens sans préjugés ; homme du monde chez les savants, et pédant dans le monde, jacobin chez les aristocrates, et chez les démocrates un noble, un homme de l’Ancien Régime, etc. Je ne suis nulle part de mise, je suis partout étranger – je voudrais trop étreindre, tout m’échappe...»

 

chamisso

Das Riesenfraülein 

Burg Nideck ist im Elsaß der Sage wohlbekannt,
Die Höhe, wo vor Zeiten die Burg der Riesen stand;
Sie selbst ist nun verfallen, die Stätte wüst und leer,
Du fragest nach den Riesen, du findest sie nicht mehr.

Le château où jadis demeuraient les géants,
En Alsace, a nom Nideck depuis fort longtemps.
Il n'en reste que ruines, balayées par le vent.
Des géants, nulle trace, hormis un conte d'antan.

Einst kam das Riesen-Fräulein aus jener Burg hervor,
Erging sich sonder Wartung und spielend vor dem Tor,
Und stieg hinab den Abhang bis in das Tal hinein,
Neugierig zu erkunden, wie’s unten möchte sein.

Ecoute en le récit : la fille des géants,
Innocente et seule, jouait devant le portail.
Poussée par l'ennui, en la vallée elle descend,
Apprendre du monde d'en-bas les petits détails.

Mit wen’gen raschen Schritten durchkreuzte sie den Wald,
Erreichte gegen Haslach das Land der Menschen bald,
Und Städte dort und Dörfer und das bestellte Feld
Erschienen ihren Augen gar eine fremde Welt.

Forêts et bois elle traverse à grandes enjambées.
A la hauteur de Haslach, elle entre en terre d'hommes
Dont les villages, clochers et champs ensemencés
Ont la semblance d'un monde inconnu qui l'étonne.

Wie jetzt zu ihren Füßen sie spähend niederschaut,
Bemerkt sie einen Bauer, der seinen Acker baut;
Es kriecht das kleine Wesen einher so sonderbar,
Es glitzert in der Sonne der Pflug so blank und klar.

Intriguée, ses regards scrutent la terre à ses pieds,
Elle remarque un paysan qui laboure son champ.
La frêle créature fait son labeur, affairée,
Le soc de sa charrue luit au soleil ardent.

« Ei! artig Spielding! » ruft sie, « das nehm ich mit nach Haus. »
Sie knieet nieder, spreitet behänd ihr Tüchlein aus,
Und feget mit den Händen, was da sich alles regt,
Zu Haufen in das Tüchlein, das sie zusammen schlägt;

« Eh, petit jouet, dit-elle, chez moi je t'emporte. »
Elle met genoux à terre et déplie un carré
De tissu où, d'un grand geste de sa main forte,
Elle dépose tout ce qui bouge et semble animé.

Und eilt mit freud’gen Sprüngen, man weiß, wie Kinder sind,
Zur Burg hinan und suchet den Vater auf geschwind:
« Ei Vater, lieber Vater, ein Spielding wunderschön!
So Allerliebstes sah ich noch nie auf unsern Höhn »

A grands bonds joyeux, on sait comment sont les enfants,
Elle revient au château et se hâte vers son père.
« Eh, père, père adoré, j'ai un jouet charmant.
Oh, jamais je n'en vis pareil en notre terre. »

Der Alte saß am Tische und trank den kühlen Wein,
Er schaut sie an behaglich, er fragt das Töchterlein:
« Was Zappeliches bringst du in deinem Tuch herbei?
Du hüpfest ja vor Freuden; lass sehen, was es sei. »

Le père était à table et goûtait du vin frais.
Il eut pour sa fille un regard bienveillant :
« Quelle est cette chose qui frétille dans ton tablier ?
Tu ne te tiens pas de joie. Montre la, céans. »

Sie spreitet aus das Tüchlein und fängt behutsam an,
Den Bauer aufzustellen, den Pflug und das Gespann;
Wie alles auf dem Tische sie zierlich aufgebaut,
So klatscht sie in die Hände und springt und jubelt laut.

Elle déplie le tissu et, avec attention,
En extrait paysan, charrue et attelage,
Qui sur la table font si belle décoration.
De joie, elle frappe dans ses mains et fait grand tapage.

Der Alte wird gar ernsthaft und wiegt sein Haupt und spricht:
« Was hast du angerichtet? das ist kein Spielzeug nicht;
Wo du es hergenommen, da trag es wieder hin,
Der Bauer ist kein Spielzeug, was kommt dir in den Sinn!

Le père s'assombrit et secoue sa lourde tête.
« Ma fille, qu'as-tu fait ? En rien, ce n'est un jouet.
Un paysan ! Insensée, as-tu perdu la tête ?
Où tu l'as pris, hâte-toi de le déposer.

Sollst gleich und ohne Murren erfüllen mein Gebot;
Denn, wäre nicht der Bauer, so hättest du kein Brot;
Es sprießt der Stamm der Riesen aus Bauernmark hervor,
Der Bauer ist kein Spielzeug, da sei uns Gott davor! »

Sans délai et sans murmure, exauce mon voeu.
Sais-tu, sans les paysans, tu serais sans pain.
De leur labeur, les géants grandissent sous les cieux
Paysan n'est pas jouet ! Dieu nous est témoin. »

Burg Nideck ist im Elsaß der Sage wohlbekannt,
Die Höhe, wo vor Zeiten die Burg der Riesen stand,
Sie selbst ist nun verfallen, die Stätte wüst und leer,
Und fragst du nach den Riesen, du findest sie nicht mehr.

Le château où jadis demeuraient les géants
En Alsace, a nom Nideck depuis fort longtemps.
Il n'en reste que ruines, balayées par le vent.
Des géants, nulle trace, hormis un conte d'antan.

Dessin de Rheinhold 

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