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site de Roland Goeller
19 avril 2020

Au jour le jour, J+29 à J+30

20200419_121620

15avril_J+29

Le discours du Président, encore ! Plus j’y songe, et plus il me donne un sentiment de joke, de burlesque. Pas un mot sur Pasques, la plus importante fête chrétienne. Pas une mise en perspective. Les rédacteurs de l’allocution sont-ils donc à ce point dépourvus de culture ? Ne se trouve-il pas, dans l’entourage du Pdt, quelque ancien capable de mesure et de hauteur ! Il me semble que le tremblement de terre de Lisbonne, la grande peste de Marseille ou la pandémie de grippe espagnole en 1915 auraient dû fournir quelques références. Les temps sont tragiques, il ne s’agit pas de monter sur scène mais un peu de solennité, tout de même ! En échange, qu’avons-nous eu ? Une attitude de soignant compatissant à l’égard de ses malades, ou de coordinateur des soignants dans le cercle d’empathie desquels il cherche à entrer ! Parbleu, nous attendons autre chose que de la compassion. Nous attendons que se tienne un discours de vérité. Sur la phase de déconfinement, ses perspectives, les hypothèses d’activité, après. Sur toutes ces questions essentielles, qui concernent notre destin collectif plus qu’à aucun autre moment de notre histoire récente, il semblerait que notre Président, qui a fait l’aveu implicite de son ignorance, envisage de s’enfermer avec un cénacle d’experts et d’énarques qui accoucheront d’un train de mesures soustraites à la confrontation démocratique. Entrer en despotisme serait un moindre mal si celui-ci était éclairé ! Et quelle désinvolture d’envisager un confinement indéfini des vieux ! Dans peu d’années, je serai compté moi aussi dans cette catégorie et, Seigneur, entre périr de Corona et périr d’enfermement, j’aimerais qu’on me laisse choisir !  

« …pour que la France sorte de ses braises ardentes, il faut refaire un peuple amoureux. Et donc avoir, pour cela, des historiens du feu sacré. Il y a, parmi eux, tant de médecins légistes ! Toutes les sociétés obéissent à la même loi: quand elles ont cessé de vivre de leur raison d’être, que l’idée qui les a fait naître leur est devenue étrangère, elles se démolissent de leurs propres mains… Elle peut se relever, à condition que nos élites méditent avec humilité la signification de l’épreuve que nous vivons. La défaite intellectuelle des mondialistes signale la fin du nouveau monde et le retour en force de l’ancien monde. Après la chute du mur de Berlin, on nous a expliqué que nous allions entrer dans une nouvelle ère, postmoderne, postnationale, postmorale, une ère de paix définitive. Ce nouveau monde nous débarrasserait des souverainetés et des États, puisqu’il serait posthistorique, postpolitique… Le tragique est revenu dans nos vies. Quand le malheur est de retour, que rôdent la guerre (par exemple à la frontière gréco-turque) ou la mort de masse (avec la pandémie), on retrouve les protections régaliennes. Il y a encore quelques semaines, le nouveau monde continuait à désigner la frontière comme le mal absolu, mais on a bien été obligés d’inventer ce qu’on appelle le geste barrière. Or, qu’est-ce qu’un geste barrière ? Une frontière, entre individus. », (extraits d’une interview de Philippe de Villiers au Figaro)

 

Jean Walter, des éditions Assyelle, me fait l’honneur de publier ce journal dans les colonnes de son site en ligne, et cela m’est une petite lumière allumée dans l’obscurité. Je ne l’en remercierai jamais assez. Je ne saurai pas cependant qui le lira, s’il est lu, s’il a présenté de l’intérêt pour ceux qui ont bien voulu lire. Écrire un tel journal consiste à cheminer le long d’une ligne de crête qui serpente entre Charybde et Scylla, d’une part l’anéantissement provoqué par la pandémie (le retour d’autres priorités, plus fondamentales, le renvoi des formes (celles qui « préservent de la barbarie » ?) à des jours meilleurs, l’incommensurable éloignement de l’auteur d’avec ses lecteurs à la fois réels et imaginaires, etc.), d’autre part la vanité et une certaine forme d’hybris (l’affirmation de l’individu, d’un individu dans un contexte où le groupe et la discipline doivent à nouveau l’emporter, mus par la responsabilité et l’abnégation dont parlait Vigny dans Grandeur et servitude). Que valent aux yeux du monde et de la postérité ces paragraphes assemblés, fruits de réflexions décousues, surgies au fil des événements depuis le 15 mars (ou plutôt de leur écho car, depuis le 17, ces événements retentissent en fausse sourdine) ? Que dis-je de plus que Leïla Slimani dont j’ai brocardé la vanité du confinement doré ? Ce journal rejoindra les innombrables journaux, commentaires, reportages, prises de paroles, gloses, essais, etc. sur les Databank de la Silicon Valley, dont le fonctionnement exige une dépense d’électricité qui n’est pas sans rapport avec l’épuisement des ressources de Gaïa. Il faudra bien qu’un peu de cohérence paraisse dans leur fil, sans quoi ! Je le rédige, jour après jour, au jour le jour, dans mon confinement qui trouve ses rythmes. L’écriture m’est un recueillement, un moment dans la journée où je rassemble, trie, structure et hiérarchise ce qui m’est livré dans le désordre. L’écriture m’est un rempart contre l’entropie. Sans elle, j’aurais le sentiment de vivre dans une maison mise à sac. Puisse ce journal fournir un autre rempart à ceux qui lui feront l’honneur d’en feuilleter les pages ! 

            De nouveaux personnages apparaissent sous la plume, d’autres se mettent en sourdine, en retrait. Ainsi de Daphné, femme quinquagénaire dont j’avais entrepris d’écrire les étapes de la nouvelle vie, confrontée à un environnement professionnel nouveau ainsi qu’à la compétition sexuelle exacerbée, supplantée par de jeunes beautés aux jambes parfaites dont le seul regard donne la mesure des choses. Daphné patiente, son drame remonte à un temps où, les femmes, à l’approche de la cinquantaine, voulaient encore remporter des victoires ! Apparaissent d’autres personnages, aux abois, johanniques, messianiques. L’errance décrite par Cormac MacCarthy, Sur la route, me revient sans cesse à l’esprit. Vers quoi sommes-nous en train de glisser ? 

 

Questions de néophyte : la Chine n’est pas précisément une entité philanthropique. Peu lui chaut, dit-on, de sacrifier une partie de ses sujets à une cause quelconque ! La Covid19 est par ailleurs censé entraîner un taux de mortalité compris entre 1 et 2% de la population (2% de 1 milliard, cela fait quand même 20 millions). Est-ce un chiffre assez dramatique pour que la Chine ait décidé de confiner aussi drastiquement et aussi longtemps, au mépris des conséquences économiques ? Craignait-elle des conséquences plus lourdes encore ? Quelqu’un a-t-il un début d’explication ? La Chine aurait-elle caché des choses ? La létalité et les conséquences sanitaires du virus seraient-elles très supérieures à ce qu’on nous en dit ? 

 

Aujourd’hui mercredi, journée des courses. A la supérette, il n’y a plus ni farine ni œufs, mais la carte bleue fonctionne encore. Les caissiers sont retranchés dans des espaces délimités par des panneaux de plexiglass, les clients passent en chicane, avec deux mètres d’espacement. Le sas d’accès de la supérette est balisé pour délimiter deux files, une pour entrer, une autre pour sortir. Le vigile cependant se voit contraint d’en rappeler la règle à la moitié des clients, lesquels sont devenus méfiants, encore courtois, mais méfiants, sous l’emprise d’une menace dont ils ne connaissent pas les effets mais dont ils ressentent déjà tout le poids. L’insouciance ordinaire est définitivement révoquée.  

 

16avril_J+30

Taïwan prétend avoir prévenu l’OMS, dès fin 2019, de la possible transmission du virus d’homme à homme (selon Le Temps, Genève). Pourtant l’Organisation ne reconnait ce fait que le 22 janvier, soit deux jours après sa reconnaissance par la Chine. Donald Trump quant à lui gèle jusqu’à nouvel ordre les contributions américaines. L’Organisation aurait-elle été noyautée par les Chinois ? Il semblerait en tous cas que nous (nous tous, les citoyens, les gouvernements, les autorités…) ayons perdu en début d’année un temps précieux. 

La presse rapporte le cas de personnes verbalisées pour avoir rendu visite à un parent nonagénaire, pour avoir invoqué le motif d’achat de première nécessité sur une attestation rédigée pour prendre une baguette de pain… Un pays qui continue de se prendre pour la huitième merveille du monde (et qui est singulièrement démuni là où d’autres réagissent avec plus de discernement) en arrive à confier de grossiers dispositifs de police à des agents que rien ne préserve des abus de pouvoir. 

« Une société est perdue quand la peur de la mort est chez elle plus forte que l’amour de la liberté. »(R. Redecker)

Les témoignages abondent, qui décrivent les épidémies et pandémies que connut le siècle passé, souvent bien plus meurtrières. Neil Armstrong prenait pied sur la Lune tandis que la grippe de Hong Kong emplissait les morgues par vagues entières. La fatalité frappait, la médecine parrait avec les moyens dont elle disposait mais nul ne songeait alors à ralentir le cours des choses. L’avenir nous dira si le Covid19 est un fléau plus redoutable mais d’ores et déjà nous pouvons constater que le spectacle permanent et larmoyant des malheurs du monde amollit les âmes et les prive de tout courage hormis celui de leur survie. 

 

 

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