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site de Roland Goeller
16 octobre 2022

Le sacrifice de Samuel Paty

paty samuel le parisien

Once upon a time un professeur d’histoire-géographie d’un collège de l’Essonne entreprend devant ses élèves un cours sur la laïcité. Le professeur non seulement applique les directives de l’académie mais il est animé par une foi inébranlable dans le progrès et il considère que la laïcité en est une quintessence. L’espace public est un espace de liberté et de tolérance où toutes les religions sont les bienvenues, croit-il, sans prérogatives particulières de l’une d’entre elles et sans que jamais soit remis en cause le droit imprescriptible de chacun de n’embrasser aucune d’entre elles. L’école de la république est le lieu par excellence de la laïcité. Pour illustrer ses propos, et en toute bonne foi, le professeur choisit de présenter et commenter les caricatures danoises qui avaient fait scandale il y a quelques décennies. Las ! Mal lui en a pris ! Les menaces, la couardise de la hiérarchie, l’islamiste tchétchène, la décollation le 16 octobre 2020, les condoléances, les enquêtes, les marches blanches, les déclarations indignées, les minutes de silence… En ce jour d’anniversaire, je lis nombre d’épitaphes parfois vibrantes, de celles que l’on destine aux héros, mais sous nulle plume n’apparait le moindre aggiornamento, le moindre mea culpa. Des incantations ! Il faut tenir cette digue, coûte que coûte… Nous avons déjà entendu cette musique. Attentat après attentat, la république et ses thuriféraires jouent leur partition comme si c’était le dernier, mais la série désormais longue des attentats et exécutions nous suggère une autre lecture. Il y a peut-être un problème autour de cette question de laïcité. Si le concept ne pose pas de difficulté, son inscription sur le socle constitutionnel républicain, à l’évidence, en pose une. « Il ne faut pas faire par les lois ce que l’on peut faire par les mœurs », prétendait Montesquieu. Nulle loi ne saura imposer ce que les mœurs rejettent, pourrait-on dire en le paraphrasant. La réalité est têtue : un nombre – suffisamment conséquent – de concitoyens rejettent désormais le principe de laïcité - et, corollaire, considèrent le blasphème comme une offense suprême - pour qu’il soit illusoire, voire obstiné, de vouloir prétendre encore à son universalité. Dès lors, et depuis quelques temps déjà, se chevauchent deux discours, d’une part celui des docteurs de la république une et indivisible, envers et contre tout, et d’autre part celui d’une communauté suffisamment nombreuse pour qu’il soit impossible de feindre de ne pas l’entendre. Si la puissance publique avait déclaré que la laïcité est un idéal vers lequel tendre, mais que la réalité des mœurs est telle qu’en de nombreux lieux elle n’a pas - ou plus - cours, alors, peut-être, Samuel Paty se serait abstenu et serait encore en vie. Mais il est dans la nature de l’obstination de ne pas céder aux évidences et, en affirmant l’universalité de la laïcité, la puissance publique met en danger ceux qu’elle charge de porter cette affirmation. Est-il usurpé de dire que S. Paty est mort autant de cette inconséquence que de la main de l’assassin qui s’est chargé des basses œuvres ? Sur combien de Paty plane cette menace ? Et sur combien celle-ci s’abattra-t-elle encore avant que l'on reconnaisse que la laïcité n’est plus inscrite dans nos mœurs et qu’il ne reste d’elle qu'un vœu pieux ? La puissance publique, inflexible, avait institué une minute de silence dans toutes les écoles mais, pusillanime, s’est gardée de faire le compte de ceux qui ont refusé de s’y associer. Aujourd’hui, deux ans après l’assassinat, Samuel Paty ne subsiste plus que dans les mémoires de ceux qui y croient encore et nombreux, aujourd’hui, parmi ceux dont on attendait qu’ils en prennent de la graine, le confondent avec un footballeur du PSG ! 

crédit-photo Le Parisien

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