Pastiche du 26 novembre

Parfois, le réel rôde devant nos portes. En lointaine Arabie écrasée de chaleur, des équipes de onze joueurs s’affrontent en des stades où règne une fraîcheur éphémère Par millions, les spectateurs les applaudissent, amnésiques de leurs indignations écologiques. 26 réacteurs sont toujours à l’arrêt par suites de négligence, EDF est en quête de soudeurs hautement qualifiés. L’étudiant assassin Raskolnikov se débat telle une souris entre les griffes du procureur-chat Porphyre Petrovitch, qui ne dispose d’autres indices que lapsus et  non-dits. Les députés NUPES militent pour l’abolition de la corrida, ils ignorent que le taureau est inscrit dans les mythologies méditerranéennes depuis les Minoens. Ils ignorent aussi les bêlements des moutons égorgés. Ils réclament désormais la mise à mort politique d’un de leurs camarades. Les bombes archaïques russes continuent de pleuvoir sur le peuple ukrainien auquel il est implicitement demandé de faire le dos rond. Le président de la république réitère sa promesse de fermeté absolue sur la question de l’immigration. Plusieurs associations réclament le mouillage d’autres Ocean Viking, les SDF errant dans leurs quartiers ne leur sont pas une priorité. Elles réclament aussi la revalorisation de leurs subventions pour cause d’inflation. La dette publique atteint les trois milles milliards, un chiffre profondément abstrait sur lequel dissertent journalistes, philosophes, agences de l’État, etc. Les commentateurs sont une partie du problème. Emma Watson, humain menstrué, repart en guerre contre J.K. Rowling, simplement femme. Lily Rose Depp est présentée comme une autre surdouée. Une femme admise aux urgences de Cochin est agressée sexuellement. L’agresseur, connu sous plusieurs identités, fait l’objet de plusieurs OQTF restées lettres mortes. Plusieurs avocats se sont proposés pour la défense de ses droits. Dans le parc où naguères jouaient des enfants errent désormais des individus patibulaires, ils sont entourés de périmètres de peur. Parfois, le réel rôde devant nos portes. Raskolnikov ne consent à se confier qu’à l’innocence offensée de Sonia.