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site de Roland Goeller
9 avril 2020

Au jour le jour, J+22, 8 avril

Une angoisse m’étreint. Elle étreint, je crois, chacun d’entre nous. Je me demande, nous nous demandons de quoi demain sera fait, vers quel monde nous allons, car même si, jour après jour, nous recensons les raisons de penser le contraire, nous prenons conscience, jour après jour, que les choses ne seront plus jamais comme avant. On mesure désormais en années les conséquences de la pandémie et la possibilité de son éradication complète semble exclue. Une boîte de Pandore a été ouverte et les calamités en sont sorties. L’air qui nous entoure restera irrespirable, du moins potentiellement transmetteur de virus. Les conséquences sociales sont incommensurables, des bouleversements sont prévisibles, la production des richesses menacée de ralentissement. Des pénuries alimentaires sont à craindre, mais aussi des troubles et des émeutes. La liberté de mouvement, mise sous contrainte de gating et de tracking. La sécurité offerte par les modèles de société occidentale en devient précaire, il faut envisager l’impuissance de l’État à assurer ses missions régaliennes, la constitution de milices répondant à des appétits incontrôlables, et la population désarmée ne sachant plus à quel saint se vouer. Les hiérarchies en seront bouleversées elles aussi, et l’annulation, probable, des dernières élections municipales ne sera qu’un épiphénomène.

vigny

Nous sommes tels des dormeurs qui se réveillent d’un rêve bucolique de concorde universelle et de Disneyland solidaire et ouvrons les yeux sur un monde cauchemardesque où nous ne sommes prêts à affronter aucune des menaces qui pèsent sur nous. Nous voyons venir à nous les conséquences de notre impréparation, de notre imprévoyance, de notre désinvolture. Si vis pacem para bellum ! Les descendants que nous nous prétendons du monde judéo-romain n’ont pas même songé à se préparer aux guerres qui s’annoncent, sanitaires, civiles, confessionnelles voire ethniques... Comment dès lors contenir cette angoisse ? J’ai entrepris la lecture de Servitude et grandeur militaires, d’Alfred de Vigny, dont Daphné et Stello, il y a quelques années, m’avaient déjà enchanté. La tranquille assurance et la

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souveraine maîtrise du langage de ce soldat-poète s’érige en phare dont les fanaux prodiguent des feux réconfortants. « Ce ne fut que très tard que je m’aperçus que mes services n’étaient qu’une longue méprise, et que j’avais porté dans une vie tout active une nature toute contemplative. Mais j’avais suivi la pente de cette génération de l’Empire, née avec le siècle, et de laquelle je suis. » Quelle grâce, quel style ! Le hasard par ailleurs m’a fait réécouter ce petit joyau musical qu’est l’aria Cold Song de Henry Purcell, et l’interprétation qu’en fait Klaus Nomi, berlinois excentrique décédé en 1983 des conséquences d’une autre épidémie, n’est pas la moins émouvante.  

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