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site de Roland Goeller
9 octobre 2009

Béatitude informatique

Il y a quelques jours de cela, j’écoutais à la radio un informaticien s’extasier sur sa discipline et la révolution, digitale et numérique, qu’elle induirait, urbi et orbi.

Certes, les lettres et les mots du texte que vous êtes en train de lire ont pris naissance sur un clavier d’ordinateur et leur auteur en fait un usage quotidien. En le mettant à la question, il avouerait sans honte qu’il ne peut plus s’en passer, de l’informatique !

Cependant, en affirmant que les « mots naissent sur un clavier », je commets un abus de langage. Car les mots sont des abstractions chargées de sens et ils naissent dans mon entendement, lequel est plus ou moins capable d’en manier la complexité. Le clavier et l’informatique ne sont que l’outil final de transposition. Mais mon informaticien n’eut cure de l’argument.  

Il n’entra pas dans ce genre de débat, déplaça les perspectives et prit un exemple : la photographie (une variante de sophisme : démontrer la règle générale à partir d’un cas particulier).  Selon lui, désormais, il ne serait plus nécessaire d’être photographe pour prendre des photos numériques. Collez votre œil sur un objectif, appuyez sur le bouton, le travail de photographe commence après, déclare-t-il. Exit tout le soin que prenait Cartier-Bresson à composer, cadrer, éclairer, mettre en perspective, en un mot, regarder longuement au point de forger une vision –avant que d’appuyer sur le bouton – regarder jusqu’à entrer à l’unisson. Tout ce travail lent et patient devenu inutile, avantageusement remplacé par le génie photographique  du processeur !

Qu’à cela ne tienne, notre informaticien delete  notre objection d’un revers de main virtuel(le). Il prend un autre exemple, la philosophie. Inutile désormais de s’échiner sur la pensée de Spinoza ou de Kant, un clique de souris permet d’y accéder, directement et instantanément. Les giga-hertz et les méga-octets ont remplacés la patience et cette « rumination » si chère à Nietzsche. La pensée est disponible en kit sur la toile. Dans l’hyper marché du savoir et de l’information, il y a désormais tout ce qu’il faut et il suffit d’acquérir les techniques de navigation pour parvenir à des sommets voisins de ceux que permet l’exercice de la philosophie et de la rhétorique.

Moi qui en son temps avais tenté d’acquérir quelques lettres en humanités, me voilà écrasé dans mon fauteuil et notre informaticien d’ajouter, goguenard, « comment, vous en êtes encore à ces vieux trucs ! »

Tenez, dit-il au journaliste, posez-moi n’importe quelle question et je vous réponds sur le champ grâce à mon super-i-pod. Il ne resta au journaliste qu’à s’exécuter. Cependant la réponse tarda à venir.

Que se passe-t-il, interrogea le journaliste.  

C’est que, répondit l’informaticien …, comment est-ce possible…, je n’arrive pas à capter le réseau !

 

Num_riser0008

 

 

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Commentaires
C
J'ai plus d'encre pour l'imprimer mais merci pour cet éclaicissement, je trouve cela vraiment intéressant
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