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site de Roland Goeller
16 novembre 2012

Accros à l'auto

 

 

 

ds2En 1960 paraît « Mythologies » de Roland Barthes. En couverture, nulle surprise de trouver en photo la mythique DS Citroën, la voiture par excellence, symbole de la France des années soixante, en plein essor des trente glorieuses. Depuis lors, la prolifération de la DS et de ses petites sœurs a profondément modifié le paysage urbain. Les voies « carrossables », les ruelles étroites, les anciennes lignes de tramway ont progressivement fait place nette à ces grands boulevards indispensables à la circulation urbaine de l’automobile. La vitesse, la facilité, le naturel presque, avec lesquels les paysages urbains se sont transformés et modelés ne s’expliquent que par un plébiscite en faveur de l’automobile.

 

Reléguée au rang de la cigarette  …

Cinquante ans plus tard, le discours a bien changé. Les énergies fossiles se font rares. Les gaz d’échappement contribuent au réchauffement climatique. Tout automobiliste est aussi un « acteur de la mobilité », comme on dit au ministère, un acteur qui parle de CO2 et de transports en commun.  A force de discours, la voiture se trouve reléguée au rang de la cigarette dont on ne cache plus les effets nocifs (mais dont malgré tout on ne peut pas se passer). Les villes, les collectivités, les agglomérations déploient des trésors d’imagination pour changer les comportements et favoriser l’émergence des transports en commun et des « modes doux », l’euphémisme qui sert à désigner le vélo et la marche à pied. Mais, récalcitrante, l’automobile résiste. Semblable au fumeur qui va cloper en cachette, le migrant urbain moyen fait rechute sur rechute et, au moindre prétexte, redevient l’automobiliste accro qu’il n’a peut-être jamais cessé d’être.

La passion a partie liée avec la possession, les amoureux le savent. La passion est physique. La passion de l’automobile a quelque chose de physique, un quelque chose dont aucun mode de transport alternatif n’offre même un ersatz. Les constructeurs d’automobiles le savent, qui soignent les finitions, à la manière dont on apprête les call-girls.

Mais la possession, aussi, a partie liée avec le patrimoine, même si la comptabilité ne prévoit pas l’inscription des automobiles dans les colonnes de l’actif (sauf les Bugatti et autres voitures de collection). Le coût d’acquisition d’une automobile est élevé, bien supérieur en tous cas à son coût d’usage (essence, assurance et maintenance). Il en résulte que, plus on utilise une voiture, plus économique devient le trajet. A trajet égal, et sauf envolée du prix de l’essence, il est plus intéressant de prendre sa voiture, les éléments fixes du prix de revient kilométrique sont déjà payés.

 

Organiser le « désamour » de l’automobile

Mais les politiques publiques ne désarment pas. Colloques de la mobilité, plans climat, livres verts, plans de stationnement et autre schémas directeurs de report modal s’enchaînent sans parvenir à éradiquer l’intruse. Celle-ci s’adapte. Se fait petite pour mieux se garer. Econome pour moins polluer … sans jamais oublier la touche de rouge à lèvres et les jantes en alliage, tout dans les détails.

Peut-être faudrait-il une mesure plus radicale ! Quelque chose comme l’organisation du « désamour » de l’automobile, un peu comme on pratique le sevrage de la cigarette ?   

Qu’à cela ne tienne, donnons à nos petits bolides l’apparence de charrettes à 4 roues avec des sièges montés sur ressorts. Versons dans le réservoir du carburant très fortement taxé pour que s’inversent les proportions des coûts d’usage et de possession. Il y a fort à parier que très vite l’engouement automobile connaîtrait une phase dépressive prolongée. On ne s’arrachait pas non plus les anciennes Trabant des pays de l’est. Un peu plus et on se mettrait à rêver ... Il en irait de l’automobile comme des biens de consommation courante dont on fait peu de cas.

Mais l’opinion publique est-elle prête à renoncer au paradi(gme) de l’automobile, la puissance publique à la manne qu’il représente et les élites à leurs signes extérieurs de pouvoir? Aussi longtemps que celles-ci se rendront aux conférences sur l’éco-mobilité au volant de rutilants quatre-quatre, l’automobile aura de beaux jours devant elle. 

 

 

 

 

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