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site de Roland Goeller
8 janvier 2013

De l'Etat-Providence à la tyrannie d'état

 guillotine

Pour un BA, un Gégé, une BB … médiatiquement exposés, combien d’autres, anonymes, mais aux fortunes comparables, sont-ils en train de choisir le chemin de l’exil ? Les raisons en sont connues, fiscales, même si pour la plupart, les exilés restent discrets. Ils ont peut-être tort : nul n’en ignorerait et la puissance publique ne pourrait pas minimiser le phénomène en le ramenant à la défection de quelques individus isolés dépourvus de patriotisme.

Que la puissance publique feigne la surprise est encore moins compréhensible : il n’a pas manqué de Cassandre qui dès les primaires socialistes en 2010 n’ont cessé d’alerter l’opinion, multipliant les signes et les avertissements sur l’importance de l’exil fiscal à venir. Mais n’a-t-on jamais écouté les Cassandre, a fortiori dans une nation laïque qui fait profession de mépriser les signes et les oracles, ces insupportables survivances religieuses ?

 

Casse-toi, pauv’riche !

Cependant cette feinte surprise se teinte d’indignation. Le premier ministre dit tout haut ce que la gauche indignée pense tout bas : « minable » est le qualificatif qui vient sur les lèves matignonesques. Et les fredons de fredonner, Torreton en tête, avec l’absolution des intellectuels: « casse-toi, pauv’riche ! ». D’autres déjà parlent de trahison et d’indignité et, petit à petit, fabriquent une détestable petite musique « d’ennemis de l’état », laquelle n’est pas sans rappeler la Terreur, époque flamboyante pendant laquelle on guillotinait tout individu suspecté d’appartenir au «parti de l’étranger». 

L‘Elysée choisit un silence qui consent et s’enferme dans le piège d’une quadrature.

Pour honorer la promesse, solennelle, de la règle d’or et donner du sens à la construction européenne, le Président doit absolument désendetter l’Etat et ramener le déficit public en dessous de 3%. La méthode choisie consiste à contingenter, très modérément, les dépenses et à augmenter, très fortement, la pression fiscale. Ceux-là même sur qui elle s’exerce figurent certes parmi les plus fortunés mais constituent aussi les rangs des entrepreneurs et autres créateurs d’emplois à valeur ajoutée marchande. On peut concevoir que l’augmentation de la pression fiscale prenne aux yeux de ces derniers les allures d’une sanction, d’autant plus incompréhensible que se multiplient les incitations à maintenir coûte que coûte, face aux menaces de la conjoncture, les emplois de leurs salariés. Ceux qui de guerre lasse choisissent l’exil fiscal privent dès lors la France des créations d’emplois, vitales pourtant pour le retour à la prospérité économique.

 

Renoncement volontaire à la liberté

Il n’y a pas de fatalité. Les choix politiques français actuels, en dépit des déclarations du premier ministre, consistent à maintenir un niveau élevé de dépenses publiques. Cela revient à donner un signe fort d’hégémonie de l’état-providence, cette sorte d’ectoplasme républicain qui protège les citoyens de tous les aléas de la conjoncture et de toutes les crises économiques. C’est encourager les réflexes de repli et de sécurité (ligne Maginot !) alors qu’il conviendrait de stimuler les attitudes novatrices et entrepreneuriales. C’est donner une « prime » au moins-disant en demandant au plus audacieux des efforts chaque jour plus importants. C’est laisser entendre à la communauté internationale (envers laquelle des engagements budgétaires forts ont été pris) que l’on privilégie cela même qui s’oppose le plus à la tenue de ces engagements !

La France n’en continue pas moins de se présenter comme dépositaire des Lumières et partie prenante dans une Europe fondée sur la libre-circulation des personnes et des biens. Du reste, les appels à la liberté n’ont jamais été aussi vibrants, notamment en direction des dictatures lointaines. Mais paradoxalement, l’hégémonie de l’état-providence impose à tous ses citoyens un renoncement volontaire à leur propre liberté, un libre renoncement. Pour que fonctionne l’état-providence, librement sorti des urnes, il est impératif que tous les citoyens, non seulement consentent à son existence par la reconnaissance du vote démocratique, mais de surcroît mettent librement à sa disposition leurs biens et leurs revenus. Dans les conditions dans laquelle la France se trouve, l’état-providence à tous prix implique le patriotisme obligatoire dans une forme politique dès lors paradoxale.  

 

Encourager la délation

D’une part, elle désigne du doigt la fortune et les revenus de citoyens qui n’ont pas pour autant cessé de bénéficier de la « présomption d’innocence » et du respect de la vie privée. D’autre part, en revenant rétrospectivement sur les conditions dans lesquelles ces fortunes se sont constituées, elle laisse entendre qu’elles furent « mal acquises ». Elle  laisse planer un doute qui ouvre la boîte de Pandore de toutes les rumeurs. Peut-être en viendra-t-on à encourager la délation : un tel cache un bas de laine qu’il ne remet pas librement, tel un dû, à la disposition de la collectivité. Le patriotisme est une libéralité. Par temps de guerre, c’est un devoir. Dans l’état-providence, il le devient aussi, et les manquements aux devoirs sont des crimes d’état.

Nous n’en sommes pas encore là mais les éléments de la rhétorique se mettent en place et, préparent, lentement, cette sorte de fascisme qui, paré des habits de la liberté, s’apprête à exercer son implacable tyrannie et, avec une froide détermination, conduire les ci-devant modernes à l’échafaud.

 

« Moi président … »

«Moi Président, je n’opposerai pas les Français les uns contre les autres … » s’exclamait François Hollande dans son discours du Bourget en avril dernier. Il fait mieux, il s’adresse aux « bons français » en désignant les « mauvais français » dont il n’y a pas lieu de faire grand cas, désavouant à peine son premier ministre. On pourrait, à l’extrême limite, considérer cette posture comme relevant d’un cynisme éclairé si elle contribuait au retour de la prospérité économique, mais il est à craindre qu’elle n’aboutisse à la conclusion inverse du sketch de Fernand Reynaud : le boulanger reste mais la boulangerie s’en va ! 

 

 

 

 

 

     

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Commentaires
L
Je partage votre mauvaise humeur. En partant pour des contrées où l'herbe est plus verte et coupée moins ras, les "riches" n'emportent pas seulement leur argent ( les rentiers sont déjà partis depuis longtemps) ils emportent avec eux leur savoir-faire créatif d'emplois et de richesses. Certains sont restés comme celui qui a renfloué le journal Libération, le chantre du prêchi-prêcha exaspérant qui dégouline actuellement des écrans de TV. Etc.. etc...
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